La Chambre de Commerce Internationale a initié le 25 septembre 2019, la révision des règles INCOTERMS. La Chambre de Commerce Internationale révise périodiquement ces règles qui sécurisent les échanges commerciaux depuis 1936. Les nouvelles règles, appelées INCOTERMS 2020, succèderont aux INCOTERMS 2010 le 1er janvier prochain 2020.
La nécessité de la révision des incoterms (1) a mené à apporter des modifications tant dans le contenu (2) que la structure des INCOTERMS (3) et avait pour ambition une meilleure lisibilité, accessibilité et modernisation de ces règles. (4)
1. Une révision des INCOTERMS adaptée à la pratique
Depuis 1936, les règles INCOTERMS sont mises au point et publiées par la Chambre de Commerce Internationale et sont révisées tous les dix ans. Insérées dans un contrat de vente, elles déterminent la date du transfert des risques de la marchandise liés au transport, et répartissent, entre le vendeur et l’acheteur, la charge des formalités d’importation et d’exportation, des assurances et de l’organisation du transport à l’occasion de la livraison d’une marchandise.
La révision des INCOTERMS mobilise l´ensemble de tous les comités nationaux qui composent la Chambre de commerce internationale. Cette révision se tient tous les dix ans afin de les adapter aux évolutions des pratiques du commerce international. Neuf ans après la version 2010 des INCOTERMS, qui avait pris effet en 2011, la nouvelle mise à jour entrera en vigueur le 1er janvier 2020. Comme chaque décennie, les INCOTERMS 2020 constitueront une évolution des INCOTERMS 2010.
La version des INCOTERMS 2010 était très empreinte de la pratique européenne. Mais pour cette nouvelle version, le groupe de rédaction de la CCI comprenait des représentants venant de Chine, Australie, Turquie. Le nouveau groupe était donc beaucoup plus représentatif de la mondialisation du commerce.
En outre, cette nouvelle mise à jour des INCOTERMS 2010 a notamment pour intérêt de simplifier et d´ expliciter les rôles de chacun afin d’éviter les ambiguïtés. Ils deviennent plus accessibles et permettent une meilleure compréhension par leurs utilisateurs.
Ce qui est d´autant bienvenue au regard du rayonnement des règles INCOTERMS qui sont désormais devenues une référence partout dans le monde, en ce qui concerne les contrats de vente.
Ainsi, les INCOTERMS 2020 s´avèrent être une amélioration des règles INCOTERMS 2010.
2. Les modifications du contenu des INCOTERMS
Les changements apportés par cette révision des incoterms correspondent et se conforment à la pratique actuelle.
Les INCOTERMS 2020 sont au nombre de onze, comme en 2010.
Bien qu´elles soient mineures, il convient de prendre connaissances des modifications relatives au contenu des INCOTERMS concernées par la révision.
Celle-ci concerne les clauses suivantes: DAT (a), CIF (b), FCA (c), et EXW (d).
a. DAT remplacé par DPU
En ce qui concerne l´Incoterm DAT, la pratique a révélé un besoin de pouvoir spécifier d’autres points de livraison dans le pays de destination comme seul terminal, autre qu´un terminal douanier. Ceci a donc conduit à un changement de désignation. Le DAT sera ainsi remplacé par le DPU qui signifie Delivered at Place Unloaded ou livré déchargé à un endroit convenu. La lettre P signifie lieu (Place) et U pour décharger (unload). Par cette modification, au-delà de l´aspect formel, désormais le lieu de destination ne sera plus uniquement limité au terminal. Cependant si le lieu n’est pas un terminal, le vendeur doit vérifier que le lieu où il est convenu de livrer la marchandise est un endroit où il est en mesure de décharger les produits. Avec cet Incoterm, le vendeur a l’obligation d’acheminer et de décharger (unload) la marchandise au lieu de destination convenu (terminal ou autre). Cela signifie que les livraisons peuvent être effectuées à un endroit quel qu´il soit où le déchargement est possible donc pas nécessairement un terminal douanier. Le vendeur a rempli ses obligations lorsque la marchandise est placée à la disposition de l’acheteur déchargée du moyen de transport principal au lieu de destination convenu. Ce lieu peut être un terminal, un entrepôt ou les locaux de l’acheteur.
Le DPU est le seul incoterm qui impose au vendeur de décharger la marchandise à destination. Cela a été fait principalement pour répondre aux besoins de l’industrie allemande d’exportation, en particulier les fabricants de machines et d’installations qui livrent à diverses destinations, comme une usine industrielle quelque part en Chine. Il s’agit donc d’une adaptation importante du nom de ces clauses Incoterms à la pratique actuelle.
b. CIP et CIF et la souscription à une assurance
Dans leur version 2010, les Incoterms CIP et CIF mettaient à la charge du vendeur la souscription d’une couverture d’assurance minimale pour garantir les risques de la marchandise. Si la souscription à une assurance minimale pour la clause CIF « Cost, Insurance and Freight » a été maintenue comme l´était dans la version 2010, une assurance tous risques sera, selon la version 2020, de rigueur pour la clause CIP – Carriage and Insurance Paid to. Cette exigence est également issue de la pratique, car l´assurance minimale s´est avérée insuffisante pour la clause CIP pour la pratique du transport multimodal, notamment pour les conteneurs.
c. FCA et l´option “on board bill of landing”
Dans la pratique les expéditeurs partent du principe que le FCA est la clause la plus efficace, quand les marchandises doivent être transportées par conteneur car la livraison a lieu à l’entrée d’un terminal à conteneurs.
Il arrive fréquemment que le financement d´un contrat de vente soit assuré par un crédit-documentaire, qui est délivré par la banque.
C’est dans ce cadre que, pour le FCA, une nouvelle option « on board bill of lading » ou encore « option pour la présentation d’un connaissement à bord » est introduite.
Une option du FCA en cas de paiement via une sécurité bancaire : l’acheteur et le vendeur peuvent convenir que l’acheteur doit donner l’instruction à son transporteur de fournir au vendeur le connaissement comportant la mention de mise à bord après le chargement des marchandises. Le vendeur étant ensuite obligé de déposer ce connaissement auprès de son institution financière à l’intention de l’acheteur.
d. EXW
L’Incoterm EXW 2010 est reconduite. Toutefois, considérée comme inadaptée au commerce et précisément au commerce international, son utilisation est conseillée par la Chambre du Commerce Internationale dans les ventes nationales. En effet, avec cette règle, le vendeur se décharge de toute formalité douanière de la marchandise à l’exportation, ce qui n’est pas toujours possible dans la pratique.
3. Les modifications de la structure des INCOTERMS
Il n´y a pas que le contenu, mais aussi la structure des INCOTERMS qui s´est vu transformée par la révision initiée par la Chambre de Commerce Internationale, dans le but, toujours de faciliter leur utilisation par les parties au contrat.
La brochure INCOTERMS contient désormais une introduction à laquelle les utilisateurs peuvent se référer pour avoir une vision des changements qui ont été opérés depuis 2010.
Par ailleurs, les clauses vont chacune s´accompagner d´ « explanatory notes » qui auront pour vocation de délivrer une explication claire aux parties sur les différents buts des clauses. En effet ce qui composait auparavant « Les notes introductives » font désormais partie des règles et deviennent les « notes explicatives pour les utilisateurs ». En d´autre termes ces « explanatory notes » constituent un guide d´interprétation de chacune de ces clauses afin de pouvoir véritablement comprendre ce que souhaitent convenir les parties au contrat.
Ensuite les dix paragraphes A et B dans chaque Incoterm relatifs aux obligations des parties au contrat seront organisées selon une toute autre logique qui commence par la livraison et mène, en passant par les différentes obligations, aux coûts.
4. Ambitions et recommandations à l´issue de cette révision des INCOTERMS
La Chambre de Commerce International développe un programme pour étendre les règles INCOTERMS afin que leur accès soit facilité pour les utilisateurs, par la mise en œuvre.
Or le but principal à l´origine de la révision de ces INCOTERMS était de favoriser et moderniser les INCOTERMS afin que les entreprises puissent plus facilement calculer quelle clause est la plus adaptée à leur besoin.
La Chambre de Commerce International recommande aux utilisateurs des INCOTERMS de se référer exclusivement à leur publication officielle. En effet il existe un grand nombre de sources relatives aux incoterms sur Internet. Or il faut se méfier de ces sources qui ne sont pas fiables et peuvent être à l´origine d´erreurs importantes pour les entreprises.
En effet les litiges surviennent principalement lorsque les parties ont convenu d´une clause qui ne correspond pas finalement à la pratique, ou lorsque le prix qui a été calculé initialement ne prenait pas en compte la totalité des coûts et risques de transport.
Tous ces aspects seront détaillés et expliqués par les clauses INCOTERMS et encore plus clairement représentés.
Il est aussi fortement recommandé d´indiquer dans les contrats, à l´avenir, qu´il est fait référence aux INCOTERMS 2020, afin d´éviter toute confusion avec leur ancienne version de 2010.
Par ailleurs, il convient de veiller à ce que les conditions générales de vente d’une entreprise ou un contrat de livraison convenue avec un co-contractant ne contredise pas l´Incoterm choisie.
Enfin, il importe de prendre conscience que le choix d’un Incoterm peut avoir un effet sur la compétence juridictionnelle dans le cadre d’une livraison intracommunautaire. Ainsi, l’art. 7 n° 1 lit. b tiret 1 du règlement (UE) N° 1215/2012 du Parlement Européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale prévoit la compétence juridictionnelle des tribunaux de l’Etat membre « où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées ». Ce sont justement les INCOTERMS qui définissent ce lieu d’exécution.
Dr. Daniel Smyrek
Pauline Blard