Quand saute le verrou de la responsabilité limitée dans une GmbH!

Le trait le plus caractéristique des sociétés à responsabilité limitée consiste justement dans la limitation de responsabilité. Dès lors que l’associé a réglé son apport ( en numéraire ou en nature) et qu’en cours de vie sociale cet apport n’a pas été remboursé, il ne peut plus être inquiété par les créanciers de la GmbH.

En cas de faillite, l’administrateur judiciaire, agissant au nom de la société, peut engager la responsabilité des associés selon le §30 et §31 GmbHG dés lors que la société leur a remboursé le capital apporté y compris indirectement par le biais de transfert de biens ou de prestations au bénéfice des associés. A titre d’exemple un apport en numéraire ayant permis à la société de rembourser un compte courant d’associé peut être considéré comme non réalisé et en cas de faillite, l’administrateur peut réclamer le reversement de l’apport. Cependant ces dispositions ne permettent pas à l’administrateur judiciaire d’exiger des associés un dédommagement plus important que le montant de leurs apports.

Il existe pourtant, selon le droit allemand, un moyen pour l’administrateur judiciaire d’outrepasser cette limitation de responsabilité. En effet, le Bundesgerichtshof (BGH) , par l’arrêt Trihotel de 2007 , reconnait une responsabilité des associés au-delà de la limitation de responsabilité liée à la forme de la société, sur la base des principes du droit de la responsabilité délictuelle, en application du §826 BGB (Code civil allemand).

La Cour suprême allemande précise qu’il s’agit d’une « Innenhaftung » en opposition à la « Aussenhaftung ». L’associé qui commet une faute caractérisée peut voir sa responsabilité engagée par la société mais pas directement par les créanciers de celle-ci. En cas de faillite cela sera à l’administrateur d’engager la responsabilité des associés.

En application de ce texte il n’est pas nécessaire que l’associé se soit enrichi personnellement de cet acte de gestion au préjudice de la société. Il suffit que l’associé ait intentionnellement, par son acte causé un dommage à la société comme par exemple privé la société d’un bien ce qui a mis l’avenir de la société en péril. On retrouve l’importance du lien de causalité car il sera impératif d’apporter la preuve que les agissements de l’associé ont causé un dommage. Le BGH a néanmoins considéré, que la cession d’un bien, à un prix bien inférieur à sa valeur comptable, n’était pas illicite dès lors que ce prix correspondait à celui pratiqué sur le marché .

Désormais il est conseillé aux entreprises françaises qui ont une filiale en Allemagne sous forme de GmbH de veiller à ce que la politique de groupe suivie ne porte pas atteinte aux intérêts propres de la GmbH et n’entraine la responsabilité de la maison mère.

Les conditions d’application de cette responsabilité sont toutefois strictes car celui qui invoque cette responsabilité doit prouver un comportement dommageable, un dommage, un lien de causalité et une intention dolosive.

Par ailleurs, cette responsabilité ne peut pas être mise en cause directement par les créanciers pour leur permettre en cas de faillite de contourner l’administration judiciaire mise en place. En conséquence, ce sera à l’administrateur judiciaire de lancer au nom de la société une procédure en responsabilité contre les associés. Dans la mesure où les risques liés á la preuve pour un tel procès sont importants et que l’administrateur doit avancer les frais de justice et éventuellement rembourser les associés sur les fonds de la société s’il perd son procès, de telles mises causes sont dans la pratique rares.

(blog rédigé en collaboration avec Catherine Huber)

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