Le code des procédures de faille a été modifié la dernière fois le 1er janvier 1999. Un projet de réforme (ESUG ou Gesetz zur weiteren Erleichterung der Sanierung von Unternehmer) est en cours visant à renforcer les pouvoirs des créanciers notamment des banques vis-à-vis de l’administrateur et de favoriser les plans de redressement judiciaire pour permettre l’assainissement des entreprises. En effet dans la plupart des cas les entreprises en faillite en Allemagne sont liquidées ou cédées à un repreneur. Les assainissements ne représentent qu’une infime partie des aboutissements des faillites.
Renforcement de l’influence des créanciers sur l’administrateur
Aujourd´hui c´est le tribunal qui désigne l´administrateur (personne physique expérimentée dans le domaine concerné et indépendante des créanciers et du débiteur – Art. 56 InsO), les créanciers ne pouvant demander qu’un autre administrateur soit nommé que beaucoup plus tard dans la procédure à savoir trois à cinq mois après l’ouverture celle étant précédée par une période d’observation d’au minimum trois mois avec un administrateur procédure.
Afin d´accroître l´influence des créanciers lors du choix de l´administrateur, le projet de réforme prévoit la nomination d´un comité provisoire des créanciers dès l´ouverture de la procédure de la procédure provisoire, et donc avant même la désignation de l´administrateur provisoire. Cette proposition pourrait se révéler en pratique contreproductive puisque la rapidité de désignation de l’administrateur provisoire est un point clé de la réussite du redressement de l´entreprise en difficulté qui se verrait retardé par les discussions des créanciers.
Volonté de favoriser le redressement de l’entreprise en faillite
Le nouveau projet n’introduit pas de Chapter 11 dans le droit allemand mais vise à favoriser le redressement des entreprises en faillite.
Tout d’abord, le projet prévoit d´autoriser la conversion des dettes contre la société en capitaux propres (“debt equity swap”). Ceci présente l´avantage de faire disparaitre certaines dettes faisant obstacle au redressement de l´entreprise (dettes d´intérêt ou remboursement de prêt), ainsi que d´octroyer aux créanciers une quote-part sur les résultats futurs de l´entreprise redressée et un pouvoir de décision sur ses futures activités.
L´exercice d´un recours par un des créanciers contre le plan d´assainissement se trouve également limité dès lors que ce recours retarderait son entrée en vigueur de manière excessive. Ainsi le plan pourra prévoir des paiements compensatoires pour dédommager certains créanciers sans que ne puisse plus être invoqué la violation du principe d’égalité de traitement des créanciers. Se faisant le législateur souhaite régler le risque qu’un seul ou que quelques créanciers puisse bloquer un plan d’assainissement qui selon la loi requiert l’accord de tous les créanciers.
Enfin, le projet de loi instaure un court délai de prescription pour les créances dès lors qu’un plan d’assainissement est prévu (un an à compter de l’homologation du plan). Ceci vise à renforcer la sécurité des plans d’assainissement.
Possibilité d’ouverture d’une procédure de faillite plus en amont
Sans attendre d´être en cessation de paiements, le débiteur pourra désormais demander l´ouverture d´une procédure de redressement avec auto-administration judiciaire par le gérant même. C’est une amorce de procédure de Chapter 11. Le tribunal devra lui faire part de ses éventuelles réserves avant d´ouvrir la procédure et les créanciers devront être associés à la décision du tribunal de confier au débiteur l´administration de ses biens.
Ce débiteur aura également la possibilité d´élaborer un plan d´assainissement en tant qu´auto-administrateur, sous la garantie d´une période d’observation de trois mois. Il sera pendant cette phase assisté d´un curateur, lequel devra pouvoir être choisi sur proposition du débiteur.
Concentration des compétences judiciaires
Le droit de la faillite en Allemagne est un droit fédéral et relève par conséquent de la compétence du Ministère fédéral de la Justice. L´organisation de l´appareil judiciaire relève quant à lui des Länder. La concentration des tribunaux en charge des procédures collectives, du moins lorsqu´il n´existe qu´un seul tribunal d´instance dans le ressort du tribunal de grande instance, relève de la souveraineté des seize Länder en Allemagne.
Le projet de loi invite les gouvernements des Länder à concentrer les compétences des tribunaux en charge des procédures collectives à un nombre restreint de tribunaux. Ce mouvement risque de changer la donne tant dans le paysage judicaire que dans la structure des cabinets d’administrateurs judiciaires (à 99% des avocats) qui risquent de se concentrer sur les grands centres économiques.
(blog rédigé en collaboration avec Timothée Chaste)